La récente conférence internationale sur les crimes du colonialisme, tenue à Alger, marque un moment historique et fondateur pour l’Afrique, un continent qui, pendant plus de quatre siècles, a été soumis à l’exploitation, à l’oppression et à des violences incommensurables. En adoptant la Déclaration d’Alger, les pays participants ont posé une étape cruciale vers la reconnaissance publique et explicite des injustices subies par les peuples africains. Ce texte confie à l’Union africaine la responsabilité de piloter un processus de justice historique, permettant de rendre réparation aux « damnés de la terre », pour reprendre l’expression emblématique de Frantz Fanon décrivant la tragédie sans nom qui a freiné le développement du continent malgré ses richesses immenses et la vitalité de ses peuples. :
La conférence a rappelé que les puissances coloniales doivent désormais « assumer pleinement leurs responsabilités historiques », en prenant en compte l’ensemble des crimes commis : de l’esclavage et des exactions de masse aux pillages de terres, en passant par les catastrophes nucléaires et environnementales qui continuent d’affecter certaines populations africaines. Cette exigence de responsabilité s’accompagne de mesures concrètes visant à préserver la mémoire et à instruire les générations futures. Parmi elles, la création d’archives numériques panafricaines, la refonte des programmes éducatifs pour inclure l’histoire coloniale dans toute sa complexité, ainsi que la mise en place de mémoriaux, de musées et de journées de commémoration. Au-delà de la mémoire, la conférence a souligné l’impérieuse nécessité de la justice et de la réparation. L’appel à l’instauration de Commissions nationales de vérité et de réparation au sein des États membres de l’Union africaine traduit la volonté de mettre en place un dispositif juridique et institutionnel capable de codifier, de manière transparente, la criminalisation de la colonisation au plan du droit international.
Ce mécanisme vise à documenter l’ensemble des crimes coloniaux et à évaluer leur impact durable sur le développement, la souveraineté et le bien-être des pays concernés. L’accès aux archives, leur restitution intégrale et la recherche scientifique sur ce sujet constituent des leviers essentiels pour une action légale efficace et crédible. La Déclaration d’Alger ne se limite pas à un acte symbolique : elle représente un programme d’action ambitieux et concret, impliquant l’ensemble des États africains, leurs mécanismes régionaux et institutions universitaires, ainsi que les communautés économiques et organisations continentales. Les universités et centres de recherche sont appelés à fournir analyses, études et propositions permettant de renforcer la criminalisation et d’engager les poursuites judiciaires nécessaires.
Cette approche intégrée, combinant mémoire, justice et éducation, ouvre la voie à une reconnaissance durable des souffrances passées et à un cadre institutionnel capable de garantir des réparations tangibles et équitables. En définitive, la conférence sur les crimes du colonialisme à Alger constitue un tournant majeur pour le continent africain, en consolidant l’unité africaine autour de la mémoire, de la justice et de la réparation. Elle ouvre une nouvelle ère où la voix des peuples victimes de la colonisation pourra s’exprimer pleinement, et où la responsabilité historique des puissances coloniales sera juridiquement et moralement reconnue. Cette étape historique, portée par l’ambition de l’Union africaine et de ses États membres, promet de transformer l’Afrique en acteur déterminé de sa propre justice et de son développement futur.
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