La planète football a retenu son souffle. Ce mardi soir restera à jamais gravé dans l’histoire des éliminatoires de la Coupe du monde 2026, tant les émotions, les retournements de situation et les exploits se sont enchaînés sur les terrains d’Europe, d’Asie et d’Amérique.
Du froid de Glasgow à la chaleur de Bassorah, en passant par les stades bouillants de Séville, Vienne ou Panama City, les nations se sont battues pour arracher leur billet vers la plus prestigieuse compétition planétaire. Et le verdict est tombé : la Suisse, l’Espagne, l’Autriche, l’Écosse, le Panama, Haïti et Curaçao ont décroché leur qualification, tandis que l’Irak a rejoint le tournoi intercontinental, s’offrant le droit de continuer à rêver.
La Suisse, la force tranquille d’une nation régulière
Ce n’est pas un hasard si la Suisse s’est imposée comme une valeur sûre du football européen. En obtenant un match nul précieux (1–1) face au Kosovo à Pristina, la Nati a validé sa sixième participation consécutive à une Coupe du monde, confirmant la stabilité d’un modèle bâti sur la rigueur, la continuité et la discipline tactique. Dans un match fermé, les hommes de Murat Yakin ont ouvert le score peu après la pause grâce à Ruben Vargas, avant de concéder l’égalisation sur un bijou signé Florent Muslija. Peu importe : la Suisse termine invaincue, solide leader de son groupe, avec la meilleure défense et une différence de buts impressionnante. Malgré les départs récents de figures emblématiques comme Yann Sommer et Xherdan Shaqiri, cette équipe a su intégrer une nouvelle génération ambitieuse, prête à prendre la relève. Avec des joueurs comme Johan Manzambi ou Djibril Sow, la Nati se renouvelle sans perdre son identité. Si le ski et le hockey restent populaires au pays, le football helvétique, lui, a su gagner une place durable dans le cœur des supporters. La Suisse participera à sa 13ᵉ Coupe du monde, preuve de sa constance au plus haut niveau.
Écosse : un miracle footballistique et un retour après 28 ans d’absence
L’une des plus belles histoires de cette soirée vient de Glasgow, où l’Écosse a écrit une page d’or de son histoire. Devant un Hampden Park incandescent, les “Braveshearts” ont arraché une victoire épique face au Danemark (4–2) après un scénario absolument invraisemblable.
Menés à deux reprises, les Écossais ont puisé dans leurs dernières ressources pour renverser la situation dans le temps additionnel. Kieran Tierney, d’une frappe splendide à la 90ᵉ+3, a redonné espoir à tout un peuple avant que Kenny McLean, d’un lob inspiré du rond central à la 90ᵉ+8, ne scelle la qualification dans une explosion d’euphorie. Vingt-sept ans après leur dernière participation à une Coupe du monde, les Écossais retrouveront enfin la scène mondiale. L’attente a été longue, marquée par des générations prometteuses mais souvent malheureuses. Cette qualification symbolise le retour d’un football populaire, passionné et ancré dans la culture nationale. À Glasgow, Édimbourg ou Aberdeen, les chants ont résonné tard dans la nuit : l’Écosse est de retour.
L’Autriche retrouve la lumière après 28 ans de disette
À Vienne, la fête a été plus sobre mais tout aussi intense. L’Autriche a décroché son billet pour le Mondial nord-américain en tenant tête à la Bosnie-Herzégovine (1–1) au terme d’un match maîtrisé. Menés dès la 12ᵉ minute, les Autrichiens n’ont jamais paniqué. Fidèles à leur rigueur tactique et à leur engagement collectif, ils ont égalisé par Michael Gregoritsch, scellant ainsi leur retour sur la scène mondiale. Il faut remonter à 1998, en France, pour trouver trace de la dernière participation autrichienne à une Coupe du monde. Depuis, le pays a multiplié les déconvenues, malgré une présence régulière à l’Euro. Ce retour consacre le travail d’une génération mûre, emmenée par des cadres expérimentés et des jeunes talents ambitieux. Demi-finalistes en 1954, les Autrichiens espèrent retrouver la flamme d’un passé glorieux, cette fois dans les stades nord-américains.
Espagne : une qualification sans panache, mais pleine de maîtrise
Championne d’Europe en titre, la Roja a tremblé, mais elle sera bel et bien du voyage en 2026. En concédant un nul (2–2) face à la Turquie à Séville, l’Espagne a assuré la première place de son groupe et confirmé son statut de grande puissance du football mondial. Privée de nombreux titulaires « Lamine Yamal, Rodri, Pedri, Carvajal, Nico Williams », la sélection de Luis de la Fuente a tout de même montré qu’elle possédait une profondeur d’effectif exceptionnelle. Dani Olmo a ouvert le score dès la 4ᵉ minute, avant que les Turcs ne profitent des absences pour bousculer la Roja. Certes, l’Espagne n’a pas brillé comme à son habitude, mais elle reste fidèle à son ADN : maîtrise, jeu de possession, et sérénité dans les moments clés. Qualifiée sans trembler, elle disputera sa 17ᵉ phase finale, avec pour objectif de reconquérir un titre mondial qui lui échappe depuis 2010.
Irak : un scénario héroïque et un peuple en liesse
Sur le continent asiatique, l’émotion était à son comble à Bassorah. L’Irak a offert à ses supporters une qualification arrachée dans les dernières secondes du barrage retour contre les Émirats arabes unis. Après un nul (1–1) à l’aller, les Irakiens ont souffert, concédant l’ouverture du score avant d’égaliser par Mohanad Ali.
Et alors que la prolongation semblait inévitable, un penalty accordé à la 90e+17 est venu bouleverser le destin du match. Amir Al-Ammari a transformé la sentence dans un silence pesant, avant que le stade n’explose dans une joie indescriptible. Cette victoire héroïque permet à l’Irak de rejoindre le tournoi intercontinental aux côtés de la République démocratique du Congo, de la Bolivie et de la Nouvelle-Calédonie. Les Lions de la Mésopotamie n’ont plus disputé de Coupe du monde depuis 1986, mais cette génération, animée par une fierté nationale inébranlable, croit dur comme fer à son retour sur la scène mondiale.
Concacaf : le rêve des “petites” nations devient réalité
De l’autre côté de l’Atlantique, la zone Concacaf a offert elle aussi son lot d’histoires fabuleuses. Le Panama a dominé le Salvador (3–0) et s’est offert sa deuxième participation à une Coupe du monde, après celle de 2018. Guidés par un collectif solidaire et un entraîneur audacieux, les Panaméens confirment qu’ils font désormais partie des nations montantes du football régional. Curaçao, petit État insulaire de 150 000 habitants, a écrit une page unique de l’histoire du sport mondial.
En tenant tête à la Jamaïque (0–0), les Curaçaolais se sont qualifiés directement pour la première fois de leur histoire, devenant la nation la moins peuplée jamais présente à une phase finale de Coupe du monde.
C’est un exploit extraordinaire, symbole du développement du football dans les Caraïbes. Enfin, Haïti a réalisé l’un des retours les plus émouvants de la soirée. En battant le Nicaragua (2–0), les Grenadiers ont validé leur première qualification depuis 1974, soit plus d’un demi-siècle d’attente. Dans un pays souvent marqué par les crises, cette victoire dépasse le cadre du sport : elle porte un message d’unité, de résilience et d’espoir. Dans les rues de Port-au-Prince, la qualification a déclenché des scènes de liesse populaire dignes d’un rêve devenu réalité.
Un Mondial à 48 équipes : l’ère de la diversité et de la renaissance
Avec 48 sélections au départ, la Coupe du monde 2026 s’annonce comme la plus vaste et la plus diversifiée de l’histoire. L’élargissement du tournoi offre une chance inédite aux nations émergentes, tout en donnant un nouveau souffle à la compétition. Les géants traditionnels seront là, bien sûr, mais ils devront composer avec des adversaires plus imprévisibles, souvent plus affamés, portés par l’énergie de leurs peuples. Le football mondial vit une mutation profonde : il n’est plus concentré entre quelques nations dominantes, mais s’ouvre à des cultures, des styles et des philosophies variées. De la rigueur suisse à la fougue écossaise, de la renaissance autrichienne à la résilience irakienne, en passant par la passion haïtienne et l’audace de Curaçao, cette campagne de qualification illustre toute la richesse émotionnelle du football.
L’esprit universel du football
Au-delà des chiffres, des scores et des classements, cette nuit historique a rappelé ce qui fait la beauté du sport roi : la capacité à unir, à émouvoir, à transcender les frontières. Dans un monde souvent divisé, le football reste un langage universel, une force qui rassemble et inspire. Alors que le compte à rebours pour le Mondial nord-américain est lancé, le message est clair : aucune nation n’est trop petite pour rêver grand. Les stades de New York, Toronto, Mexico ou Los Angeles s’apprêtent à vibrer au rythme de cette nouvelle ère du football mondial. Et si le spectacle s’annonce grandiose, cette nuit de qualifications restera, elle, comme le prologue épique d’une Coupe du monde pas comme les autres.
R.S
