TOKYO-L’Asie sous tension : marchés chahutés, économie japonaise en repli et tempête sur les valeurs touristiques

dknews
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Les marchés asiatiques ont entamé la semaine sur une note sombre, dominés par une série de signaux économiques préoccupants et d’incertitudes géopolitiques. Entre la dégringolade du bitcoin, le repli du yen, la contraction inattendue de l’économie japonaise et une chute spectaculaire des valeurs liées au tourisme à Tokyo, l’Asie s’enfonce dans une atmosphère de vigilance extrême. La région, déjà sensible aux variations des marchés mondiaux, fait face à une convergence de facteurs qui amplifie le risque d’instabilité à moyen terme. Dès l’ouverture des marchés lundi matin, les places boursières ont révélé un tableau particulièrement contrasté. À Tokyo, le Nikkei reculait de 0,48 % pour s’établir à 50.131 points, tandis que le Topix perdait 0,68 %. Ces replis, bien que modérés, symbolisent la nervosité croissante des investisseurs japonais, confrontés à un contexte économique fragilisé. À l’inverse, Séoul bondissait de 1,67 %, offrant un certain contrepoids régional, tandis que Taipei progressait de 0,55 %. Sydney se repliait légèrement (-0,14 %) et Hong Kong cédait 0,32 %, traduisant une tendance générale marquée par l’hésitation et l’absence d’optimisme durable.

Les inquiétudes mondiales aggravent la nervosité asiatique

Ces variations interviennent après une fin de semaine difficile sur les marchés internationaux. Les Bourses mondiales avaient clôturé dans le rouge, alourdies par les inquiétudes persistantes concernant la situation économique des États-Unis. Le blocage budgétaire prolongé à Washington, empêchant la publication de statistiques officielles, a accentué l’incertitude mondiale et nourri de nouvelles spéculations sur l’état réel de la première économie mondiale. Dans ce climat d’inquiétude alimenté par l’absence de visibilité, les actifs financiers jugés risqués ont été parmi les premiers à subir ce choc. Le bitcoin, véritable thermomètre de la prise de risque, a perdu près de 7 % vendredi avant de s’effondrer à 92.935 dollars en début de séance asiatique lundi, un niveau inédit depuis avril. La cryptomonnaie tentait néanmoins un léger rebond en matinée (+2,1 %), revenant à 95.401 dollars. Ce mouvement erratique illustre parfaitement le regain de volatilité qui domine actuellement les marchés numériques. Le marché des devises, lui aussi, n’a pas été épargné. Le yen se dépréciait légèrement, reculant de 0,12 % pour atteindre 154,74 yens pour un dollar. Cette baisse s’ajoute à une tendance de fond entamée depuis plusieurs mois, faisant du yen l’une des devises les plus affaiblies parmi les grandes économies industrialisées.

Une économie japonaise sous pression

Au-delà des turbulences boursières, le Japon est confronté à une nouvelle alerte économique : la contraction de son produit intérieur brut (PIB) au troisième trimestre 2025. Le gouvernement a annoncé que l’économie nippone s’était repliée de 0,4 % entre juillet et septembre, une première depuis un an et demi. Ce recul, bien que moins prononcé que prévu, confirme que la reprise amorcée après la pandémie reste précaire et instable. Plusieurs éléments expliquent cette fragilité : Un ralentissement marqué des exportations, conséquence directe des droits de douane imposés par les États-Unis, même après la conclusion d’un accord plafonnant ces taxes à 15 %.

Une chute notable des investissements immobiliers, reflétant un secteur en perte d’attractivité.

Une consommation intérieure stagnante, minée par une inflation persistante qui réduit le pouvoir d’achat des ménages. Les exportations, colonne vertébrale de l’économie japonaise, ont reculé en août pour le quatrième mois consécutif (-0,1 %). Si un léger rebond a été observé en septembre grâce aux semi-conducteurs, les exportations vers les États-Unis ont continué de s’effondrer (-13,3 %), révélant l’impact direct des tensions commerciales avec Washington.

Inflation persistante et politique monétaire incertaine

Autre défi majeur : la flambée des prix. L’inflation japonaise a atteint 2,9 % en septembre, largement au-dessus de l’objectif de 2 % fixé par la Banque du Japon (BoJ). Tirées par la hausse des prix de l’énergie et du riz, ces tensions inflationnistes compliquent davantage la tâche des autorités monétaires. Après avoir initié un resserrement historique de sa politique monétaire en mars 2024, mettant fin à dix années de taux proches de zéro, la BoJ a finalement suspendu ce resserrement au début de l’année. Cette décision reflète la crainte de fragiliser encore davantage une économie déjà exposée à de multiples chocs. Face à cette conjoncture défavorable, la Première ministre Sanae Takaichi pourrait être amenée à acter un vaste plan de relance, évoqué dès son arrivée au pouvoir. L’objectif serait de soutenir l’économie à travers une hausse des investissements publics, un appui renforcé aux ménages et un accompagnement ciblé aux secteurs en difficulté.

Les valeurs touristiques plongent à Tokyo

La journée de lundi a également été marquée par un effondrement spectaculaire des actions liées au tourisme sur la Bourse de Tokyo. Ce secteur, qui avait pourtant retrouvé des couleurs grâce au retour massif des voyageurs internationaux, a brutalement décroché à la suite d’un avertissement émis par Pékin concernant les voyages vers le Japon.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes :

 Shiseido: –9, 66 %, ANA: –3, 48 %, Japan Airlines: –4, 62 %, Fast Retailing (Uniqlo): –4, 83 %, Takashimaya: –5, 51 %, J. Front Retailing –3, 75 %. La Chine représente un quart du total des touristes étrangers visitant l’archipel. En septembre 2025 seulement, le Japon avait accueilli 3,2 millions de visiteurs internationaux, dont 775.500 Chinois. Le moindre signal négatif émanant de Pékin se répercute donc immédiatement sur l’ensemble du secteur touristique japonais.

Un marché énergétique en perte de repères

Enfin, le marché pétrolier n’échappe pas à cette dynamique morose. Le baril de WTI reculait de 1,03 % pour s’établir à 59,47 dollars, tandis que le Brent cédait 0,93 % à 63,80 dollars. Les craintes d’un excédent d’offre mondiale et l’incertitude planant sur l’économie américaine pèsent lourdement sur les cours.

Une région plongée dans l’incertitude

Entre les secousses boursières, l’instabilité du marché des cryptomonnaies, la fragilité de l’économie japonaise et les tensions géopolitiques qui menacent le tourisme, l’Asie aborde une période délicate. Cette convergence de difficultés laisse présager une volatilité prolongée dans la région, avec un impact potentiel sur l’ensemble des économies mondiales. Le climat de prudence qui domine aujourd’hui pourrait devenir la norme dans les semaines à venir, dessinant les contours d’une année économique sous haute tension.

R.E

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