ÉDITORIAL DK NEWS DU JOUR : Le compte à rebours énergétique est-il réellement engagé ?

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Depuis la fin du deuxième millénaire, un récit persistant annonçait la fin imminente des énergies fossiles. Des prévisions récurrentes, souvent alarmistes, ont marqué les esprits, notamment lorsque, dans un célèbre journal télévisé de l’ENTV, la présentatrice Zahia Benarous évoquait ce qu’elle présentait comme « le début de la fin du pétrole ». Pourtant, des décennies plus tard, force est de constater que ces scénarios n’ont pas résisté à l’épreuve du temps. Non seulement la planète n’a pas tourné la page des hydrocarbures, mais elle en demeure toujours fortement dépendante. L’industrie gazière et pétrolière continue d’opérer à plein régime, soutenue par une demande mondiale qui ne cesse de croître. Jamais ou presque la production n’a souffert d’un manque. Loin de s’épuiser comme anticipé, l’offre reste surabondante, confirmant que les hydrocarbures conservent un rôle central dans l’équilibre énergétique mondial.

Les experts du domaine, tout comme les grandes organisations énergétiques, reconnaissent unanimement que ces ressources ont encore de belles années devant elles. Mais la vraie question demeure : pour combien de temps encore ? Car, en dépit de leur omniprésence, les énergies fossiles ne sont pas éternelles. Leur appellation même « non renouvelables » rappelle leur caractère limité. Si les spécialistes hésitent à donner une date exacte, beaucoup situent l’horizon critique autour de 2050. Une échéance symbolique qui soulève un immense défi : n’aurions-nous réellement qu’un quart de siècle pour repenser nos modèles énergétiques, adapter nos sociétés, et anticiper un avenir où les hydrocarbures deviendront plus rares ou plus coûteux ? Aujourd’hui, près de 80 % de l’énergie consommée dans le monde provient encore des fossiles. Les 20 % restants sont assurés par les énergies renouvelables.

Mais là aussi, les défis abondent : coûts élevés, investissements insuffisants, et relâchement notable dans les efforts mondiaux liés à la lutte contre le changement climatique. Plusieurs grandes firmes ont d’ailleurs réorienté une partie de leurs projets vers le gaz, jugé plus rentable, plus accessible, et surtout classé comme énergie « propre » depuis la COP27 de Charm el-Cheikh. Ce repositionnement stratégique du gaz n’est pas anodin. Abondant, économique et désormais considéré comme un pilier de la transition énergétique, il occupe une place centrale dans les politiques énergétiques de nombreux pays. Selon les projections consolidées, la demande mondiale en gaz devrait continuer à augmenter dans les décennies à venir. Cette tendance a été réaffirmée lors d’une rencontre conjointe entre l’OPEP et le Forum des pays exportateurs de gaz (GECF), deux organisations qui façonnent à elles seules l’avenir énergétique mondial. Lorsque ces deux géants recommandent urgemment d’accroître les investissements à long terme dans les hydrocarbures, c’est un signal fort : le monde continuera de dépendre massivement des énergies fossiles, avec ou sans échéance 2050. Plus encore, le duo OPEP-GECF met en garde contre un risque majeur : celui d’un sous-investissement qui pourrait, paradoxalement, provoquer une crise énergétique bien avant l’épuisement physique des ressources.

Les prévisions financières donnent d’ailleurs le vertige : d’ici à 2050, il faudra investir environ 11.100 milliards de dollars dans le gaz et près de 18.200 milliards dans le pétrole pour maintenir un niveau suffisant de production. Et au-delà de 2050 ? Les experts sont prudents, parfois évasifs. Ce qui est certain, c’est que la bénédiction des hydrocarbures, si généreuse aujourd’hui, n’est pas éternelle. Le compte à rebours est peut-être déjà enclenché. Reste à savoir si le monde saura s’adapter avant que la page ne se tourne définitivement.

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