La mer n’a pas seulement un parfum de sel et de liberté, elle porte aussi la mémoire de drames humains qui ont endeuillé des familles entières. Face à la recrudescence inquiétante des accidents maritimes, les autorités locales et nationales tirent la sonnette d’alarme. La sécurité des professionnels de la mer est désormais érigée en priorité absolue du ministère de la Pêche et des Productions halieutiques, décidé à mettre fin à une série noire qui ternit l’image d’un secteur vital pour l’économie côtière. C’est dans ce contexte d’urgence que la direction de la Pêche et des Ressources halieutiques de la wilaya d’Annaba a organisé, au port de la Grenouillère, une importante rencontre placée sous le thème de « la sécurité et la prévention des accidents maritimes ». L’événement, qui a rassemblé plus de 150 participants « pêcheurs, armateurs, techniciens et représentants d’associations professionnelles » a permis de dresser un constat lucide sur la situation et d’ouvrir le débat sur les mesures à adopter.
Les chiffres présentés au cours de la journée d’étude parlent d’eux-mêmes : en cinq ans, Annaba a enregistré sept accidents graves impliquant des bateaux de pêche, causant la mort d’au moins douze marins et la disparition de sept autres. À l’échelle nationale, l’année 2024 a comptabilisé plus de 72 accidents maritimes, dont près de 10 % dans cette seule wilaya. Ces statistiques, lourdes de conséquences humaines et économiques, ont suscité une réelle prise de conscience collective. Le ministère de tutelle, alerté par ces données alarmantes, a donné instruction à ses directions régionales de renforcer les dispositifs de contrôle et d’inspection des embarcations. Parmi les principales mesures envisagées figurent la création de nouveaux postes de sécurité maritime et le renforcement des centres spécialisés dans la sécurité des navires, sous la responsabilité des Affaires maritimes. Ces structures auront pour mission de vérifier la conformité technique des bateaux, de s’assurer du respect des normes de navigation et de veiller à la protection de la vie humaine en mer, tout en luttant contre les risques de pollution.
Les débats ont également porté sur la révision des procédures de sécurité dans les ports et les chantiers navals, ainsi que sur la formation continue des marins. La question de l’amélioration des conditions de travail et de la couverture sociale des pêcheurs a été longuement discutée, dans un secteur souvent marqué par la précarité et le manque d’équipements adaptés. Les participants ont insisté sur la nécessité d’un accompagnement durable, combinant prévention, sensibilisation et modernisation des infrastructures portuaires. Au-delà des constats, cette rencontre s’est voulu une tribune de dialogue et de concertation. Les pêcheurs, souvent premiers témoins des dangers de la mer, ont pu exprimer leurs préoccupations et formuler des propositions concrètes. Le ministère entend, à travers ce type d’échanges, instaurer une relation de confiance et de partenariat avec l’ensemble des acteurs du domaine halieutique. La mer demeure une source de vie et de richesse, mais elle exige vigilance et respect. À Annaba, les autorités semblent déterminées à tourner la page des drames et à faire de la sécurité maritime une culture partagée. Car derrière chaque embarcation, il y a des vies, des familles et tout un pan du patrimoine maritime national qu’il s’agit de préserver.
R.L
