Crise au Mali : des experts de l’ONU pressent les putschistes d’abroger le décret suspendant les activités des partis politiques

dknews
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Des experts indépendants mandatés par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies ont pressé les putschistes au pouvoir au Mali d’ « abroger » le décret, rendu public mercredi dernier, qui suspend les activités des partis politiques et des associations, une mesure qui a plongé le pays dans une grave crise politique.

La junte au pouvoir au Mali doit « immédiatement abroger » le décret signé par son chef, le général Assimi Goïta, qui suspend les activités des partis politiques et des associations, ont exigé les experts qui ne parlent pas au nom de l’ONU.    

« De plus, s’il est adopté, le projet de loi du 30 avril mettra le Mali en contravention avec ses obligations en matière de droits humains, notamment en ce qui concerne les libertés d’association et d’expression », ont-ils ajouté.

L’adoption d’un projet de loi abrogeant les protections fondamentales de la participation politique par le « Conseil des ministres » du 30 avril et la signature d’un décret, mercredi, suspendant les activités des partis politiques jusqu’à nouvel ordre « constituent une violation directe des droits humains fondamentaux », rappelle le groupe d’experts, dont Eduardo Gonzalez, expert indépendant sur la situation des droits humains au Mali.

La junte avait invoqué une « raison d’ordre public » alors qu’une coalition de partis politiques d’opposition appelle à manifester, ce vendredi, contre leur possible dissolution et pour un retour à l’ordre constitutionnel dans le pays.

Les experts contestent l’argument des autorités de transition maliennes selon lesquelles ces mesures « visent à mettre fin à la prolifération des partis politiques », tout comme l’explication des militaires putschistes au pouvoir selon laquelle leurs propositions sont directement issues de différents dialogues nationaux.

« Aucune consultation véritable n’est possible dans le climat actuel de suppression de l’espace civique, où les opposants et les journalistes indépendants ont des raisons de craindre que la liberté d’expression soit sanctionnée », ont estimé les experts.

En prévision des manifestations de ce vendredi, ils rappellent que « le droit de se réunir pacifiquement est essentiel à la santé d’une communauté politique dynamique ». « Les autorités de transition maliennes doivent le respecter scrupuleusement et s’abstenir d’actes d’intimidation et de répression mettant en péril l’intégrité physique et les droits des manifestants », ont-ils souligné.

Dans le même contexte, l’ONG Amnesty International (AI) a appelé, dans un communiqué, les militaires putschistes au Mali à revenir sur leur décision de suspendre les activités des partis politiques dans le pays, la considérant comme « contraire à la Constitution » adoptée en 2023 par les autorités de transition qui garantit l’existence des partis politiques et affirme leur droit de « constituer et d’exercer librement leurs activités dans les conditions fixées par la loi ».

L’ONG des droits humains a déclaré aussi que cette mesure « est incompatible avec les obligations internationales du Mali en matière de droits humains, notamment la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ».

Le Mali est embourbé dans une grave crise politique : fin avril, une concertation nationale organisée par les putschistes à Bamako, largement boycottée par les partis d’opposition, avait recommandé la suppression pure et simple des partis politiques. Les autorités ont alors annoncé l’abrogation de la loi encadrant le fonctionnement des partis politiques.

Craignant cette dissolution, une coalition d’une centaine de partis s’est formée pour « exiger la fin effective de la transition politico-militaire au plus tard le 31 décembre 2025 » et appeler « à la mise en place d’un calendrier de retour rapide à l’ordre constitutionnel ».

Cette nouvelle coalition a réussi à mobiliser plusieurs centaines de personnes lors d’une manifestation samedi dernier à Bamako. Une nouvelle manifestation de protestation est prévue ce vendredi dans la capitale malienne.

Mali: les partis reportent leur rassemblement, dénoncent des menaces proférées par les putschistes

Les partis politiques engagés pour la défense de la Constitution malienne ont annoncé le report à « une très prochaine date » de leur mouvement de contestation populaire, initialement prévu ce vendredi à Bamako pour exiger de la junte militaire au pouvoir notamment l’annulation du décret portant suspension de leurs activités, dénonçant « des appels à la violence » et des menaces proférés par les putschistes.

Dans un communiqué repris par des médias, le Collectif des partis politiques pour la Constitution a annoncé « le report à une très prochaine date du meeting initialement prévu pour ce vendredi 9 mai courant au monument de l’indépendance de Bamako ».

Ce report s’explique, souligne le communiqué, par  »des manœuvres corroborées, entre autres, par les multiples appels à la violence, les menaces et les insultes proférés sur les réseaux sociaux par deux membres du Conseil national de transition (CNT) qui, par lâcheté, se sont finalement cachés (et) la diffusion sur les mêmes réseaux d’une fausse demande antidatée pour la tenue d’un autre rassemblement, aux mêmes heure et lieu (que celui des partis), attribuée à des inconnus se faisant appeler « Jeunes leaders » ».

« Les partis politiques pour la Constitution, conscients de leur responsabilité envers la vie humaine, rejettent toute forme de violence et de tueries planifiées », a indiqué le document avant d’ajouter que les partis « continuent à s’opposer fermement aux violations de la Constitution et aux mesures liberticides et antidémocratiques », qu’ils ont d’ailleurs soumises en urgence à la justice dont ils attendent, « en toute confiance », les décisions.

La coalition d’opposition, regroupant une centaine de partis, exhorte, en outre, « les Maliens de l’intérieur comme de l’extérieur à rester mobilisés et à l’écoute des prochains mots d’ordre ».

Le chef de la junte malienne, le général Assimi Goïta, avait décidé, mercredi dernier, de suspendre « jusqu’à nouvel ordre » les activités des partis politiques et des associations à caractère politique sur toute l’étendue du territoire, selon un décret présidentiel lu à la télévision nationale.

Le Collectif des partis politiques pour la Constitution (regroupant une centaine de partis et de mouvements politiques maliens) a annoncé, jeudi, avoir engagé une procédure judiciaire en urgence pour exiger l’annulation de ce décret, à l’origine de la grave crise politique qui secoue le Mali.

Pour rappel, une coalition d’une centaine de partis s’est formée pour « exiger la fin effective de la transition politico-militaire au plus tard le 31 décembre 2025 » et appeler « à la mise en place d’un calendrier de retour rapide à l’ordre constitutionnel » au Mali.

Cette nouvelle coalition a réussi à mobiliser plusieurs centaines de personnes lors d’une manifestation samedi dernier à Bamako lors de laquelle les protestataires ont réclamé « la liberté, la démocratie » et « des élections » alors que les putschistes ont manqué à leur engagement de transférer le pouvoir aux civils en mars 2024, après deux coups d’Etat militaires en 2020 et 2021.

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