L’Algérie s’apprête à franchir une étape décisive dans la construction de son autonomie industrielle et dans l’essor économique de ses régions du Sud avec le lancement, dès le premier trimestre 2026, de l’exploitation du minerai de fer de la gigantesque mine de Gara Djebilet, à Tindouf. Ce projet, suivi de près par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, est considéré par les experts comme l’un des piliers majeurs de la transformation industrielle du pays et un levier déterminant pour l’émergence d’un pôle économique intégré dans cette vaste région méridionale. Lors du dernier Conseil des ministres, le président a ordonné l’entrée en exploitation effective du minerai de fer extrait du gisement, tout en veillant à ce que la première cargaison soit transportée dès 2026 vers le complexe sidérurgique Tosyali d’Oran via la nouvelle ligne ferroviaire reliant Tindouf à Béchar.
Cette infrastructure, dont l’inauguration officielle est prévue en janvier 2026, constitue une pièce maîtresse d’un dispositif logistique essentiel à la rentabilité du projet. Le Conseil des ministres a par ailleurs validé la création d’unités de traitement du minerai dans trois wilayas stratégiques : Tindouf, Béchar et Naâma, lançant ainsi une nouvelle dynamique industrielle profondément ancrée dans les potentialités régionales. Pour l’expert économique El Houari Tigharsi, l’exploitation de la mine de Gara Djebilet représente un tournant historique. Il rappelle que ce gisement, parmi les plus vastes du monde avec ses 3,5 milliards de tonnes de réserves, offre à l’Algérie une occasion unique de bâtir une véritable base minière nationale structurée autour du traitement local du minerai. Selon lui, l’installation d’usines dans les wilayas concernées permettra non seulement de créer des chaînes de valeur diversifiées, mais aussi de favoriser l’émergence de nouvelles activités industrielles dans les domaines de la métallurgie, de la mécanique, de la construction et de la logistique.
Ces perspectives s’accompagnent d’un potentiel considérable de création d’emplois directs et indirects, à même de redessiner profondément le paysage économique du Sud algérien. L’expert souligne également l’importance stratégique de la ligne ferroviaire Tindouf-Béchar, véritable colonne vertébrale du projet. Son inauguration, attendue pour janvier 2026, devra permettre une baisse notable des coûts de transport et garantir une cadence continue d’acheminement du minerai vers les unités de transformation, ainsi que vers le complexe Tosyali. Cette fluidité logistique est, selon lui, une condition indispensable pour assurer une production stable, compétitive et évolutive. Dans une vision plus large, l’expert Abdelkader Slimani estime que cette exploitation conférera aux wilayas du Sud un rôle inédit dans le tissu industriel national. Pour la première fois, ces régions participeront de manière structurée à l’alimentation des chaînes de valeur sidérurgiques locales, ce qui contribuera à réduire significativement la dépendance aux importations de fer.
L’acheminement du minerai vers Tosyali renforcera la production nationale en matières premières stratégiques, améliorera la compétitivité des industries locales et ouvrira des perspectives accrues d’exportation. Selon Slimani, l’Algérie disposera ainsi d’un outil supplémentaire pour maîtriser son marché du fer, ce qui constitue un avantage stratégique dans un contexte mondial où les matières premières connaissent une volatilité croissante. Pour Slimani, les nouvelles usines de traitement permettront également de dynamiser l’économie des wilayas concernées. Elles fourniront la matière première aux industries nationales tout en attirant des investissements complémentaires, notamment dans les industries de transformation qui utilisent le fer comme base de production. La présence de ces unités dans trois wilayas constitue, selon lui, un pas déterminant vers l’édification d’un véritable pôle industriel au Sud. L’ouverture ferroviaire vers Béchar revêt également un intérêt géo-économique majeur.
Elle facilitera les flux commerciaux et permettra à Tindouf de jouer un rôle régional de premier plan, notamment grâce à sa proximité avec la frontière mauritanienne. Cette position stratégique pourrait transformer la région en porte d’entrée vers les marchés d’Afrique de l’Ouest, attirant ainsi des entreprises désireuses de bénéficier d’un accès logistique fiable et compétitif. Pour sa part, l’expert et directeur de l’École supérieure de commerce de Koléa, Ishak Kherchi, insiste sur la valeur ajoutée que générera l’exploitation du gisement, notamment en réduisant la facture des importations et en renforçant la compétitivité du secteur sidérurgique national. Il rappelle toutefois la nécessité de garantir la disponibilité des infrastructures de base indispensables au projet, particulièrement l’approvisionnement en eau et en énergie, ainsi que le déploiement de chaînes logistiques robustes. Selon lui, l’efficacité de l’ensemble du projet dépendra en grande partie de la capacité du pays à sécuriser ces facteurs essentiels, qui conditionnent directement la réduction des coûts de production et la continuité de l’alimentation des unités industrielles.
La réalisation de la ligne ferroviaire Béchar–Tindouf–Gara Djebilet, longue de 950 km, constitue à ce titre le socle logistique du projet. Décomposée en trois grands tronçons « Béchar-Hammaguir (200 km), Tindouf-Oum El Assel (175 km) et Hammaguir-Oum El Assel-Tindouf-Gara Djebilet (575 km) » cette infrastructure est conçue pour répondre aux besoins colossaux du transport d’un minerai dense, volumineux et stratégique. Une fois opérationnelle, elle permettra de relier rapidement les zones de production aux centres de transformation et aux infrastructures portuaires, garantissant ainsi l’intégration complète du gisement dans l’économie nationale. L’Algérie, en misant sur Gara Djebilet, engage donc une étape déterminante dans son ambition de s’imposer comme un acteur majeur de l’industrie sidérurgique régionale. Ce projet, nourri par une vision stratégique, vise à transformer profondément le Sud et à en faire un moteur de croissance pour l’ensemble du pays. Avec des retombées économiques, industrielles et sociales d’envergure, et en accélérant la dynamique d’intégration territoriale, l’exploitation du géant minier de Tindouf apparaît d’ores et déjà comme l’un des chantiers les plus structurants de l’Algérie nouvelle.
R.E
