cinéma : Nori Rouikem alias Kamatcho, le « little big man » du petit écran (PORTRAIT)

dknews
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Le comédien sétifien Nori Rouikem, plus connu sous le sobriquet de Kamatcho, fait partie de ces acteurs confinés dans des seconds rôles, campant généralement des personnages d’arrière-plan, mais qui parviennent, grâce à leur charisme, à ravir la vedette aux stars.
Il y a des chances pour que cela se vérifie une nouvelle fois en mars prochain lors de la diffusion par la télévision algérienne du téléfilm « El Firak », dont il vient juste d’achever le tournage sous la direction de Youcef Mahsas.

Toujours souriant, Kamatcho a su dénicher la bonne formule pour se faire aimer du public, s’aidant pour cela de son air espiègle et d’une faconde à toute épreuve.
Rien, pourtant, ne semblait prédestiner ce personnage très attachant à une carrière sur les planches d’un théâtre ou devant une caméra de télévision.
Adolescent, il menait une vie tranquille et discrète, passant le plus clair de son temps dans son quartier de « Tandja » (nom donné à la cité Yahiaoui de Sétif, la plus populaire de la ville) au milieu de ses copains, discutant des sujets les plus en vogue : le football et l’Entente sétifienne.
Cependant, ces « réunions », Kamatcho les entrecoupait de plus en plus souvent d’escapades à la Maison de la culture Houari-Boumediene où il s’adonnait à son autre passion, juste après le football : le théâtre.
Régulièrement sollicité par ses amis comédiens et metteurs scène, en particulier le monologuiste Tewfik Mezaâche,surtout connu pour ses one man shows « Lemfartas », « Fordja » et « Moins 5 », Kamatcho participe régulièrement à des pièces de théâtre produites à Sétif et voyage aux quatre coins du pays dans le cadre de tournées.

C’est Mezaâche qui, le premier, donnera sa chance à Kamatcho en lui confiant un rôle dans une pièce écrite par lui, intitulée « El harrag wa Es Sarrab ».
Kamatcho entre ainsi de plain-pied dans une carrière de comédien-amateur de plus en plus demandé.
Sa carrière d’acteur de théâtre reste toutefois modeste, pour ne pas dire confidentielle jusqu’à cette fraîche après-midi du printemps 1979.
Ce jour-là, se souvient Kamatcho, « je me trouvais au quartier, avec mes copains habituels, lorsqu’une voiture immatriculée « 16 », stoppa à ma hauteur, et un monsieur que je ne connaissais pas, à l’époque, en descendit et se dirigea vers moi ».

Il s’agissait, en fait, poursuit-il, du regretté Abderrahmane Bouguermouh qui venait d’effectuer des repérages à Sétif en vue du tournage du fameux « Kahla oua Beïda », le téléfilm en noir et blanc qui allait défrayer la chronique à sa sortie en 1980 et dont chaque rediffusion par la télévision nationale constitue jusqu’à aujourd’hui l’événement du jour dans la capitale des Hauts plateaux.
« Bouguermouh m’a d’abord sondé pour voir si j’accepterais un rôle dans son film », se souvient-il avant d’enchaîner : « vous parlez si j’allais accepter ! ».
Abderrahmane Bouguermouh confia alors à Kamatcho une copie du scenario avant de lui fixer rendez-vous pour le lendemain au café « Chez Ali », non loin de la fontaine d’Ain Fouara où allait être donné, quelques jours plus tard, le premier tour de manivelle de « Kahla oua Beida ».

Lorsqu’un tour chez le coiffeur manque de ruiner le rêve du jeune Nori Rouikem !

Avant de s’étendre sur les détails du tournage de Kahla oua Beida, Kamatcho a tenu à raconter cette anecdote : le lendemain matin, juste avant de se rendre à son rendez-vous, le jeune homme, qui avait à l’époque les cheveux longs et soyeux, crut bien faire en faisant un crochet au salon de coiffure du coin, histoire d’adopter un look BCBG.
« Dès qu’il m’aperçut, Bouguermouh se prit la tête à deux mains et me cria +mais où sont donc passés tes cheveux ?+ », raconte-t-il dans un éclat de rire.
Abderrahmane Bouguermouh, qui préférait, de toute évidence, le Kamatcho aux cheveux longs, plus en phase avec la mode des années soixante-dix, était apparemment déçu (mais pas pour très longtemps) du nouveau style adopté par celui qui allait attendrir par son sympathique minois tous les téléspectateurs de « Kahla oua Beida ».

Kamatcho, qui gardera ce surnom dans le film (un sobriquet qui lui avait été collé par Nabil Zaghlaoui, ancien footballeur de l’Entente aujourd’hui établi en Tunisie) avoue avoir été quelque peu « intimidé », au début, en prenant connaissance du casting du film.
Cette œuvre d’Abderrahmane Bouguermouh met en vedette, en effet, une brochette de comédiens parmi les plus célèbres du cinéma algérien.
« Vous vous rendez compte ? moi qui ne m’étais jamais tenu devant une caméra j’allais jouer sous la direction d’Abderrahmane Bouguermouh aux côtés de Chafia Boudraâ, Sid-Ahmed Agoumi, Ahmed Benaïssa, Kaci Ksentini, El Amine Benmaâmar et autre Osmane Bechikh.
C’était un rêve éveillé auquel j’avais du mal à croire », raconte Kamatcho, les yeux pétillants.
Toutefois, l’effet de surprise s’estompant, Nori Rouikem, aujourd’hui âgé de 62 ans, tint parfaitement son rôle aux côtés de stars qu’il adulait, poussant même, pour les besoins du film, la chansonnette en interprétant « Lali Yema Lali », un classique de la musique Staïfie qui figurera parmi les moments les plus émouvants du film de Bouguermouh.

Cette toute première expérience de Kamatcho devant la caméra, même s’il n’était pas l’acteur principal de « Kahla oua Beida », lui a tracé une voie d’acteur à part entière puisqu’il est régulièrement distribué dans des téléfilms et autres sitcoms produits par la télévision algérienne.
Prenant à cœur les rôles qui lui sont confiés, Kamatcho, parrainé par son ami de toujours Lamri Kaouane – un autre comédien de grand talent –, fait partie des « chouchous » de nombreux réalisateurs algériens qui lui confient, encore aujourd’hui, des rôles dans des séries télévisées familiales diffusées en général durant les veillées du mois sacré de Ramadhan.

Le grand public a pu le redécouvrir dans « Sebaâ Hadjrat » (sept pierres), « Douar Essalihine », « Dechrat Zaki » ou encore « Akh el Banat » où il partagea la vedette avec Zineb Arrès et Faouzi Saïchi, entre autres.
Sans renier les planches qui lui firent découvrir l’art du spectacle et qui forgèrent son talent, il a récemment bouclé le tournage, sous la direction de Youcef Mahsas, d’un téléfilm intitulé « El Firak » (la séparation) qui sera diffusé sur le petit écran en mars prochain, durant le Ramadhan.
Du quartier populaire de « Tandja » aux studios de la télévision nationale, en passant par « Kahla oua Beida », Nori Rouikem, dit Kamatcho, aura fait son bonhomme de chemin dans le monde du spectacle, réussissant à faire de sa passion un métier.

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